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Georges. J.  Arnaud
Entre polygraphie et parfums d’enfance

Sans doute pour en fuir les horreurs, aux lendemains de la guerre nombreux furent-ils, à se lancer dans des entreprises d’écriture aux allures de saga qui firent naguère le succès des feuilletonistes mais aussi d’un Dumas ou d’un Paul Féval. Tous n’y réussirent pas aussi bien que Georges J. Arnaud, auteur à ce jour de plusieurs centaines de romans et de nouvelles touchant à tous les domaines de ce qu’il est convenu d’appeler « la littérature populaire ». Sans doute, chez lui, le désir d’écrire remonte-t-il à l’enfance, aux cahiers remplis sans cesse, même s’il faut attendre 1951 et le prix du Quai des Orfèvres pour que la vocation ancienne prenne sa forme publique et son orientation. Ne voulant pas jouer de la confusion avec son homonyme, auteur du Salaire de la peur, c’est sous le nom de Saint-Gilles, sa petite ville natale, mais aussi sous de multiples pseudonymes, Fréderic Mado, Georges Ramos… que, pendant plusieurs années il livrera des ouvrages qui, nécessité matérielle aidant, toucheront à tous les genres, du policier avec Gil Darcy jusqu’au cycle érotique de Marion. Le hasard, ou il vaudrait mieux dire la reconnaissance de son talent, le font entrer au panthéon de l’écriture populaire de l’époque, Le Fleuve Noir. C’est le début d’une aventure de plusieurs décennies qui lui permettra de flâner, chaque fois avec bonheur, dans des territoires aussi différents que les récits de la collection Angoisse, en passant par les romans d’espionnage ou les Spécial Police ? Qui ne se souvient de ces couvertures où le réalisme faisait bonne place à l’onirique, à leurs jeux de couleurs, du vert olive au rouge sanglant, symboles insidieux de la violence et du tourment des personnages ? Qui a oublié le tour de force de celui qui, refusant de renier ses idées, introduit dans une collection connue pour son conservatisme et ses peurs de la modernité sociale, avec « Le Commander », un personnage se faisant, au fil des ouvrages, un défenseur intransigeant des droits de l’homme ? Plus près de nous dans le temps c’est l’épopée de La compagnie des glaces et ses soixante-deux volumes qui en font un maître incontesté de la science fiction française.
Puis, la fin des années 1990 voit la naissance d’une trilogie composée du Moulin à nuages, des Oranges de la mer et de Patates amères, auquel il faut joindre le roman L’Etameur de la mort. Tous ces livres sont hantés par l’enfance, par les récits que, aux premières années il entendait raconter chaque soir par les habitués qui se pressaient au petit hôtel de ses grands-parents. A travers ces souvenirs c’est l’histoire familiale qui se décline, vue à travers les yeux des siens, filles ou garçons. C’est la découverte de la variété d’un territoire complexe et toujours mystérieux, qui va des Corbières à la plaine de Coursan en passant par Leucate, livré aux tourments de l’histoire. Une saga que sa richesse et sa précision transforment en un délectable recueil identitaire où les plaisirs de l’imaginaire le disputent à la richesse ethnographique.

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