Il est toujours des lieux dont le destin est d’accueillir nos rêves. Pour Renaud Maillard-Salin et sa compagne ce fut les horizons de la Narbonnaise, le bruissement des paysages qui la construisent, de lagunes en vestiges de la romanité et, en ultime offrande, les parfums de l’enfance retrouvée. Là pouvait trouver à s’accomplir la trilogie des désirs et leurs échos, l’attrait pour les fêtes médiévales répondant au goût des jeux et au plaisir des créateurs-brasseurs. Le Moyen Âge c’est celui des légendes que nourrira une expérience chez un brasseur exerçant dans la forêt de Brocéliande, celui des exploits héroïques qui vont revivre à travers les jeux de rôle pratiqués à la MJC de Narbonne, le goût de saveurs oubliées et retrouvées à force de patience et de persévérance. Puis, outre les jeux générés par cette thématique ce sont ceux, originaux et divers, fruit eux aussi d’une recherche permanente, où la convivialité est la règle, soit qu’on se les procure à L’Échoppe médiévale, la boutique où ils accompagnent les bières, soit qu’on se fasse utilisateur d’un soir de l’un de ceux qu’offre L’Antre de l’échoppe, la cave ou plutôt le petit réseau de caves chaleureux où se rendent curieux et amateurs de bière. Car le monde des jeunes hôtes, leur commerce, traditionnel ou chtonien, s’organise autour de cette boisson.
Très tôt, après des études en agroalimentaire, le couple est emporté par le mouvement qui, ces dernières décennies, part à la découverte de la bière pour mieux la remettre en honneur loin des grandes brasseries industrielles et de leurs produits au formatage réducteur. Ici, là, partout en province une myriade de passionnés part à la découverte des pratiques anciennes, du temps où dans de multiples villages, la plupart des petites régions fabriquaient leur boisson. À Narbonne donc ils brassent, deux fois par semaine, offrant leur production, à la vente au magasin ou à la consommation directe à la taverne, après avoir sillonné un temps les marchés pour mettre en valeur les fruits de leur savoir-faire. L’aventure, couronnée de succès, outre le plaisir renouvelé des rencontres et des échanges, se place toujours sous le signe de la curiosité et de la découverte. Dans les deux lieux, nous sommes conviés à un voyage, dans l’espace, mais aussi dans le temps. À la boutique, au long des étiquettes c’est le monde qui s’offre à nous, les grandes bières irlandaises ou hollandaises côtoient leurs consœurs d’Estonie et du monde entier, sans oublier la théorie des productions locales, celles de Béziers, d’Ornaisons, de Puylaurens, de l’Ariège voisine… Mais le charme réside aussi dans l’abolition des siècles avec des produits oubliés, dont le nom à lui seul enchante comme l’hypocras et l’hydromel aux fragrances de temps anciens. Là, cependant, ne s’arrête pas l’émerveillement puisque, chaque saison les deux brasseurs renouvellent le plaisir des sens en inventant, éphémères, de nouvelles alliances, de nouvelles recettes dont l’une, à base de moût de raisin se fait signe d’une nouvelle complicité entre bière et vin.
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