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Jules Calmettes
ou la musique partagée

A première vue tout tient du conte de fée dans le parcours de Jules Calmettes. Depuis l’enfance émerveillée où le père, marin au long cours, avait ramené au village le premier gramophone, où la mère enchantait littéralement la maison de sa voix de soprano, où un musicien complice et bienveillant transportait dans un autre monde le petit garçon, plus attiré par la musique, les étangs et la maraude que par l’ennui lourd de l’école.
N’est-ce pas cette mère artiste, passionnée de cinéma qui aida son fils, jeune maçon démuni, à acquérir son premier saxophone ? Mais le rêve n’aurait pas suffi s’il n’avait appelé à la rescousse les deux fidèles compagnons que furent le travail et l’effort. C’est eux, et eux seuls, qui permettront à l’enfant ignorant des premières règles du solfège de retenir les airs et les mouvements, de pénétrer au coeur de l’harmonie, d’aller toujours plus loin, c’est eux qui le guideront pendant le service militaire où il sacrifie jeux de cartes et escapades avec les copains au profit des répétitions quotidiennes dans une mansarde. Sans doute aussi est-ce cette persévérance qui fit supporter les années toulousaines, incertaines, de vaches maigres, et il est certain qu’ils sont aussi à l’origine du succès qui ouvre au jeune musicien les portes du Club Méditerranée, puis celles des grands music-halls comme l’Olympia, qui lui font faire l’illustration sonore des représentations de Brecht et de Boulgakov au Théâtre de laVille avant d’accompagner les plus grands noms de la chanson française. Mais n’est-ce pas perdre sa vie que la gagner en trépidances illusoires. Et, très vite, à la gloire le jazzman préfère le pur plaisir de la musique, c’est alors le retour à Gruissan, vers le lieu des origines et celui d’une nouvelle naissance.
Dès lors ce qui importe avant tout c’est ce qui sera le mot d’ordreconstant de Jules Calmettes : partager son savoir ! Ainsi aux enfantséblouis il apprend la sensualité des sons, la complicité avec l’instrument,la maîtrise du souffle comme le jeu du corps. Bientôt sa petite écolemunicipale de musique devient exemplaire avant de se faire, là aussi trèsvite la pépinière des meilleurs talents. Mais les douceurs du village blottiau bord de l’étang ne suffisent plus à contenir l’enthousiasme des enfantset autres grands élèves et l’orchestre local parcourt toute l’Europe, estinvité dans les lieux les plus prestigieux, côtoie les célébrités qui necachent pas leur admiration comme Lionel Hampton, s’empare desclassiques, donne un West Side Story resté dans toutes les mémoires, uneversion burlesque de CarmenxA son tour Gruissan accueille desformations venues du Sud comme de l’Est dans une ambiance joyeuse etconviviale, ouverte sur la diversité du monde et de ses musiques. Dès
lors, pour tous ceux qui ont participé à cette passionnante aventure, par sa générosité, sa chaleur et son sens de l’écoute Jules Calmettes prend toute la figure d’un mythe, alors que le musicien, insensible aux honneurs, s’efforce, inlassablement, en jouant ou en composant, de déchiffrer lesmystères et les secrets de l’harmonie.

Contact :
jules.calmettes@yahoo.fr

texte écrit par Jean-Pierre Piniès

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