La littérature des troubadours a suscité au cours du XXème siècle de nombreuses études se partageant entre la place de la lyrique courtoise dans l’histoire de la littérature ou la variété de ses motifs (amour courtois, rapports avec le catharisme, satirique politique…). Gérard Zuchetto, désireux d’échapper aux visions toutes faites, après avoir lu l’ensemble des travaux consacrés aux troubadours a décidé d’explorer un aspect un peu délaissé, celui de la mise en œuvre de leurs poèmes et de leurs chants. Pour ce faire il est parti à la chasse, à travers l’Europe, de tous les textes existants, enfouis dans les archives du Vatican et les autre trésors italiens, les réserves de la Bibliothèque Nationale ou les grands centres ibériques.
Il s’agissait pour lui de trouver le chiffre, de découvrir quelques-unes des clés de cet art singulier où la musique et les textes se mêlent et se répondent. Le génie du troubadour c’est en effet de trouver le mot juste et subtil, mais sans la bonne mélodie les textes ne seraient que médiocres : homme d’esprit il est aussi un maître de l’art vocal et un chanteur d’excellence. Comment rendre compte aujourd’hui des performances chantées de ces créateurs médiévaux ? Tous les détails issus de leur biographie, leurs commentaires les quelques indications qu’ils ont laissées peuvent nous aider. Outre une lecture un peu bénédictine de leurs écrits, Zuchetto a longuement scruté les images et les miniatures éclairant leurs gestes, leur position de chant. Cette recherche menée depuis plus de vingt ans a fait de lui le meilleur connaisseur actuel de la lyrique courtoise mais, dans son esprit, cette connaissance devait aboutir à la restitution la plus fidèle que possible de cet univers vocal. Le chercheur s’est aussi fait interprète, en même temps qu’auteur et compositeur. Il ne s’agissait pas de se laisser aller à une théâtralisation superficielle, mais, bien au contraire, d’emprunter la voie complexe de l’intériorisation du métier de trouveur, de renouer avec les dimensions à la fois les plus métaphysiques et les plus musicales de ce répertoire. Ce long travail sur la voix s’est aussi accompagné de recherches sur les instruments, quitte à fabriquer ceux qui avaient disparu, et d’interrogations minutieuses sur la manière probable dont les troubadours en jouaient.
Plus de trente albums sont venus couronner cette quête qui a trouvé un de ses aboutissements dans le Centre Na Loba consacré aux troubadours et fréquenté par les meilleurs spécialistes. Ces enregistrements ont été accompagnés de concerts dans le monde entier, de compositions musicales pour les télévisions européennes, différentes formes d’oratorios, ballades et d’opéras, de multiples émissions de radio et de spectacles à tonalité contemporaine. Car Gérard Zuchetto, fort de ses connaissances, a aussi entrepris de jeter un pont entre tradition et modernité en se livrant à des créations originales et fructueuses sur des textes occitans contemporains, issus en particulier de l’œuvre poétique de Max Rouquette ou de René Nelli.
Repères.
Discographie. La petite lampe sur la mer, 1994 / Primavera d’amore, 1999 /Milgrana clausa, 2002 /Flamenca, 2003 /Villancicos populares de Andalucia, 2004.
Bibliographie. Le livre d’or des troubadours, 1998/L’Ode / Aude des troubadours, à paraître.
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