Mercredi 5 Juin 2013
Le jardin comme exercice du temps
par Anne Cauquelin
philosophe, auteur entre autres de Le Site et le Paysage (2007), Petit traité du jardin ordinaire (2005), L’invention du paysage (2004).
Alors que le paysage avec son lointain bleuté, son horizon infranchissable et sa longue durée s’installe aisément dans les structures spatio-temporelles a priori, n’offrant dès lors à l’expérience qu’une version convenue du temps, le jardin en revanche développe une gamme miroitante de temporalités.
En effet, si la contemplation d’un paysage peut se jouer sur un seul mode : celui d’une harmonie, d’un enveloppement du sujet dans le monde qui n’appelle aucun “faire” spécial, le “faire” du jardin convoque, lui, une multiplicité d’approches temporelles différentes et cependant présentes simultanément. C’est de cette simultanéité multi-temporelle que j’aimerais parler, me référant, plutôt qu’au visible et à la spatialité étale, à une sorte de rythmique musicale qui joue avec les taches de tous les jours selon une composition toujours renouvelée.